Le char d'assaut français
Saint Chamond M.16
1916-1918

Par Marc KENDAL

Traduit de l'anglais

Image 1 :
Bien que le char français Schneider fut le premier conçu et construit en France, sa conception ne fut pas approuvée par le Service Technique Automobile (STA), dont la mission était de superviser toute production de chars pour l'armée. À son tour le STA se mit rapidement au travail pour sortir sa propre "boîte de conserve", en concurrence avec celle d'Étienne Schneider. De cette précipitation naquit le Saint Chamond, dont le premier prototype fut terminé au début 1916.

Le chassis était basé sur la suspension du tracteur Holt américain, comme bon nombre des premiers chars et, comme vous pouvez le voir sur cette photo d'une des premières versions, la caisse était déportée à une certaine distance des chenilles. Cette particularité fit du St. Chamond un véhicule très difficile à conduire sur terrain accidenté et même de s'y tenir assis, surtout si vous étiez à l'avant ou à l'arrière et sujet au mal de mer.

Les conditions que le véhicule devaient remplir étaient de surpasser le Schneider, fournir une enveloppe blindée à un canon de 75 mm, et traverser les tranchées du front. Le véhicule ne remplit que partiellement ces desiderata, et fut même mis en doute à de nombreuses reprises. Le caisson était construit à partir de plaques métalliques rivetées de 17 mm d'épaisseur et, avec le canon de 75 mm et les quatre mitrailleuses de 8 mm, le blindé (AFV = Armored Fighting Vehicle) pesait plus de 23 tonnes.

Les premiers véhicules, tel celui de cette photo (quelquefois appelé Mk.I) de l'Imperial War Museum de Londres, avaient un toit plat muni de kiosques en forme de "poubelle" sur l'avant du blindé, pour le conducteur et le commandant. Ces dispositions devinrent de parfaites plages de repos pour les grenades à main lancées par les ennemis, et plus tard les véhicules seront construits avec des toits en pente permettant de faire rouler les grenades avant qu'elles n'explosent.

Le reste de l'équipage était composé de six personnes, tirailleurs et mécaniciens, entraînés à l'utilisation de l'armement et aux complications de la mécanique du véhicule.



Image 2 :
Il existe peu d'images de l'intérieur du St. Chamond, et j'ai dû fouiller loin pour récupérer certains détails des espaces intérieurs du véhicule. Certaines des photos de cette page sont des agrandissements, et bon nombre proviennent de l'Imperial War Museum ainsi que du Musée des Blindés de Saumur en France.

Cette photo/dessin retouchée des ateliers de St. Chamond donne un aperçu de l'agencement de l'espace intérieur. Le véhicule de gauche montre sa face avant installée avec son canon de 75 mm, de même que sa caisse à munitions qui prend place sur la plateforme du côté droit du caisson. Notez qu'il y a une porte de caisson dans la paroi de droite après la caisse.

Cachée ici, mais visible sur le caisson de droite, une ouverture près de la porte est destinée à la mitrailleuse Hotchkiss. Une autre mitrailleuse était montée juste à droite du canon de 75 mm, une troisième sur le côté gauche du caisson, en face de celle de droite, et une quatrième à l'arrière, à la gauche du véhicule, au-dessus de la porte arrière.

Juste derrière et à gauche de la culasse du canon de 75, se situe un râtelier où l'on suspendait les boîtes en bois.contenant quelques obus de 75 mm. Également peu visible sur le véhicule de droite on aperçoit les formes rondes des moteurs électriques, à l'arrière, à travers le vide de la plaque de blindage qui est en train d'être fixée. Notez comment le caisson est composé de plaques de blindage rivées sur un simple cadre, et qu'il y a une grande ouverture en haut et à droite (véhicule de droite) de la plaque arrière. Cette ouverture, il me semble, était destinée à un conducteur à l'arrière avec ses propres commandes de direction permettant de piloter le char en marche arrière, en cas de besoin. Les véhicules en construction ici, appartiennent à la seconde version (quelquefois appelée Mk. II) avec son toit en pente, comme on peut le voir sur la forme des panneaux blindés des côtés et d'arrière.



Image 3 :
C'est une autre image de la construction du St. Chamond prise dans les ateliers de St. Chamond de la Compagnie des Forges et Aciéries de la Marine et Homecourt.

Sur cette photo retouchée de l'atelier  la porte arrière est ouverte sous/près de la mitrailleuse arrière, et les ouvrières appliquent de la peinture de camouflage sur le caisson terminé. La transmission Holt très caractéristique est particulièrement nette ici, de même que la forme de bateau du caisson, tellement en porte-à-faux aux deux bouts. La source d'énergie utilisée sur char était d'une conception très intéressante. Elle était composée d'un moteur à essence Panhard monté au centre du caisson, couplé à une dynamo (génératrice), derrière laquelle sont alimentés deux moteurs électriques, un pour chaque chenille, situés à l'arrière du véhicule.

L'échappement du moteur sortait du véhicule juste au-dessus de la machine, et vous pouvez voir ici les conduits, le silencieux et le tuyau d'échappement circulant tout le long du toit jusqu'à l'arrière droit. Est aussi visible ici la porte droite du caisson, de même que le pivot cylindrique du support de la mitrailleuse juste à côté d'elle.



Image 4 :
Autre photo de la fabrication, celle-ci non retouchée, qui montre l'installation de l'ensemble moteur/dynamo/radiateur. N'oubliez pas que cette unité n'était pas directement couplée à l'arbre moteur, mais qu'elle fournissait l'énergie, au moyen de cables, aux moteurs électriques situés de chaque côté de l'arrière, au niveau du plancher.

Le canon principal est visible à la gauche de l'image, et les deux caisses de munitions se font face, près de l'avant. Sur le côté du caisson, vous pouvez voir le pivot cylindrique du support de la mitrailleuse et le trou de visée juste à côté. Le moteur sur la gauche du cadre suspendu, la dynamo est fixée juste derrière et l'assemblage du radiateur avec son ventilateur sont au-dessus de la dynamo. La transmission Crochat Collardeau qui est fixée aux moteurs électriques n'est pas visible ici. Le moteur Panhard était un quatre cylindres en ligne, et développait un bon 90cv.

Imaginez un instant le bruit et les fumées à l'intérieur du char quand le moteur fonctionnait et que le véhicule rebondissait sur le sol défoncé. Notez le relativement faible nombre de rivets fixant le blindage sur son cadre.



Image 5 :
Un agrandissement du moteur Panhard sur l'image précedente montre plus de détails de cette partie de l'intérieur du char. Une fois installé, il n'y avait pas d'écran entre le moteur au centre et l'équipage, et, se faire brinquebaler dans la campagne à l'intérieur d'un de ces monstres de métal devait être assez proche de l'enfer pour eux.

L'air de refroidissement était amené par de larges ouvertures sur le toit puis, pulsé au travers du radiateur, il entrait dans le compartiment de l'équipage au-dessous. Dans un véhicule où la température de l'air à l'intérieur devait dépasser les 40 degrés Celcius la plupart du temps, l'équipage ne devait guère apprécier cet air réchauffé insufflé dans le char. Le refroidissement des radiateurs des premiers chars britanniques étaient également conçus de cette manière, et l'idée d'expulser l'air déjà chaud de l'intérieur vers l'extérieur du char au travers des radiateurs n'apparut pas sur les véhicules conçus avant la fin de la guerre.

Maintenant vous pouvez voir clairement les quatre cylindres sortir du carter du moteur, et une fois installé dans le véhicule, les conduites d'échappement sortir tout droit vers le silencieux sur le toit au dessus. La dynamo était reliée par d'épais cables électriques.aux moteurs situés de chaque côté du caisson à l'arrière, et on peut voir sur le radiateur, dans son cadre au-dessus de la dynamo, quelques planches laissées là temporairement.



Image 6 :
Cette photo a été prise en se tenant devant le gros moteur Panhard, et en regardant l'arrière, ce qui donne une vue de face du grand groupe moteur à essence.Ayant débuté en 1876, Panhard et Levassor était le premier fabricant français de moteur à combustion interne. Bien qu'ils furent plus connus ensuite pour leurs moteurs de voiture, pendant la Grande Guerre Panhard produisit un certain nombre de produits militaires pour le gouvernement Français, y compris des milliers de moteurs à essence destinées à des applications diverses.

Le moteur du St. Chamond était un moteur d'autobus modifié, élaboré avec Daimler pour être produit avant la guerre. Bien que je continue à chercher des informations sur ce moteur en particulier, Panhard était connu pour utiliser des bloc-cylindres en aluminium et des culasses rapportées en acier. Le graissage est ici assuré dans un carter sec sous pression d'huile avec deux pompes, et l'allumage semble se faire par magnéto. Également la plupart des moteurs Panhard utilisaient des carburateurs Zénith.

La manivelle est clairement visible à droite, montée au-dessus du vilebrequin. On peut voir les quatre pistons noirs alignés sur le dessus du carter, et les tubulures d'échappement monter vers le toit. Les quatre cables rassemblés en nappe en haut à droite sont les fils d'alimentation des bougies, reliant la magnéto en bas à droite aux cylindres en haut de l'image. Les tubulures à gauche (courbées) et celles du milieu en haut (recourbées au-dessus du moteur) sont les conduites d'eau de refroidissement provenant et retournant au radiateur. Sur cette photo le réservoir d'huile est également visible en bas à gauche de l'image.

Cette intéressante motorisation pétrole/électrique (peut-être le Dr. Porsche regardait-il ?) pouvait propulser le St. Chamond à 8 km/h sur de bonnes routes mais les petits réservoirs d'essence et le faible rendement ne permettaient que des trajets de 60 km.

Les archives françaises au musée de Saumur indiquent que quelques véhicules ont été prêtés aux Russes, aux Italiens et aux Américains pendant la guerre. Mais les Italiens et les Américains ont utilisé les leurs à titre d'entrainement uniquement. Ce qui laisse les Russes comme utilisateurs potentiels du St. Chamond en opération pendant la Grande Guerre, bien que je n'aie vu aucune documentation en ce sens.



Image 7 :
Une des rares images de l'intérieur du St. Chamond qui montre également l'emplacement des huit membres de l'équipage. Il y en a cinq visibles sur cette remarquable photographie. Nous sommes sur le côté droit du moteur, en regardant vers l'avant le canon principal, avec le mitrailleur de droite juste en face de nous. Un autre mitrailleur partiellement caché par celui-ci (le commandant ?) utilise la Hotchkiss montée à côté du canon de 75 mm.

Tout à fait à gauche le conducteur est assis sur son siège surélevé et utilise les leviers près de son siège pour diriger le char. Du fait que la traction réelle était électrique, la direction était remarquablement facile sur le St. Chamond, au contraire des reproches des conducteurs des autres chars de cette époque.

De l'autre côté du moteur (à votre gauche) on voit le dos du mitrailleur gauche. Le râtelier à munitions que nous avons aperçu sur une photo de construction est maintenant clair, et complet avec ses boîtes en bois suspendues contenant quelques obus de 75 mm.



Image 8 :
Une vue plus rapprochée du mitrailleur droit montre quelques détails supplémentaires. La boîte à munitions que nous avions vue sur ce côté du véhicule est tout à fait à droite, et si vous regardez attentivement sous la mitrailleuse et la main du mitrailleur vous verrez quelques bandes de munitions utilisées sur la mitrailleuse Hotchkiss modèle 1914. Sa main droite est sur la gachette et sa gauche maintient l'arme. Un regard est accessible sur le dessus du pivot cylindrique du support de la mitrailleuse, juste au-dessus du pontet du barillet. Les tirailleurs devaient se fatiguer énormément pour voir quelque chose à l'extérieur au travers de ce regard. Plus vraisemblablement, le tirailleur devait simplement arroser les alentours avec ses balles, en espérant tenir l'infanterie ennemie à une distance suffisante pour passer en sécurité.

Du fait que les militaires français ont, à l'origine, organisé leurs unités de chars en tant que branche de l'artillerie, l'unité opérationnelle de base était la batterie (platoon [peloton] dans les autres armées), qui ordinairement était formée d'un groupe de quatre chars (ou moins). L'uniforme de l'équipage comprenait la capote de service standard bleu horizon (gris-bleu moyen), et sur le col étaient portés les écussons indiquant les unités d'artillerie d'origine du soldat, cousus de fils bleus, verts ou blancs sur le fond rouge de la pièce.

Les membres de notre équipage, sur cette photo, portent le casque Adrien peint en bleu foncé, et des courroies de cuir marron "Sam Brown". Le soldat au premier plan porte un pistolet Ruby automatique (ou un revolver 1892) dans son étui en cuir, large et triangulaire, qui est en bandoulière sous son bras droit et pend dans son dos. Le revolver était officiellement appelé Modèle d'Ordonnance 1892, et c'était le revolver officiel français de service depuis 1892 jusqu'avant la seconde guerre mondiale.

De nombreux équipages de chars portaient également le manteau de cuir noir descendant jusqu'à mi-cuisses (avec son grand col rabattu) comme protection à l'intérieur du véhicule. À l'occasion, vous pourrez voir le manteau, porté par dessus des bleus de travail, au lieu de la tunique bleu horizon et du pantalon. Ici le mitrailleur porte une boîte à masque à gaz en bandoulière sous son autre bras.

Le seul autre équipement personnel que vous verrez sur la plupart des charistes français à cette époque est un sac en toile de calicot, également à sangle, et contenant ordinairement de la nourriture ou tout autre effet personnel.



Image 9 :
Ce n'est pas la meilleure photo d'une mitrailleuse Hotchkiss de la première guerre mondiale, mais elle nous suffira ici. Un Américain, Benjamin Berkely Hotchkiss (1826-1885), fonda la Hotchkiss Company, et au cours de sa vie conçut et fabriqua de nombreux types d'armes à feu à usage militaire. Ceux-ci comprenaient un unique révolver canon et le fusil Winchester-Hotchkiss adopté par l'armée et la marine américaines. La mitrailleuse qui porte son nom est probablement la plus connue des armes Hotchkiss, et Benjamin était mort depuis quelques années quand elle fut effectivement conçue par un autre membre de sa société, puis produite.

Le modèle 1914 de base était fait pour tirer plusieurs calibres de munitions, suivant l'usage qui en était demandé par les forces armées. Les Français utilisaient des munitions de 8 mm dans leurs armes.

Cette mitrailleuse était la seule mitrailleuse lourde de la guerre qui soit réfroidie par air et fonctionnant au gaz. Pesant 20 kg, c'était aussi la plus lourde. Les concepteurs ont résolu les problèmes de surchauffe du canon en ajoutant un "radiateur" massif, un anneau cylindrique en acier qui entoure le canon et dissipe la chaleur. De cette façon la mitrailleuse pouvait soutenir une cadence de quelques 200 tirs à la minute.

Fonctionnant au gaz veut dire qu'une partie du gaz provenant du tir d'une balle est dirigé par des trous vers le canon du dessous pour actionner un piston qui repousse la culasse, ce qui réarme le mécanisme. La quantité de gaz, et donc la cadence de tir, pouvaient être contrôlée en tournant le régulateur que vous pouvez voir juste sous le canon au bout de la chambre du piston.

L'alimentation Hotchkiss utilise des bandes de métal embouti pour maintenir les cartouches des bandes de 24 balles, ou quelquefois 30, qui pouvaient être engagées séparément ou agraphées ensembles pour obtenir un feu continu. Elles étaient généralement transportées dans des boîtes de protection à charnières en bois contenant 12 bandes, soit un total de 288 balles, qui pesaient environ 12 kilos. Les bandes étaient insérées du côté gauche du magasin, après que la poignée de chargement en forme de T ait été ramenée en arrière et que le verrou à l'arrière du magasin ait été fermé. Comme je l'ai dit, la cadence de feu était de 200 tirs à la minute, mais elle pouvait atteindre 600 à la minute en courtes rafales.

Tant les Français que les Japonais adoptèrent la première version 1878, et après une modification de la culasse, les Britanniques et les Américains y vinrent également et achetèrent la Mitrailleuse Hotchkiss Modele 1897 en grande quantité. La plupart des modèles 1914 ont cette poignée en anneau en forme de D à l'arrière du magasin (comme on le voit sur cette publicité Hotchkiss). Le canon et le magasin sont en acier bleui, tandis que la poignée en D et la crosse de type pistolet sont en laiton massif.

Le canon fut utilisé sur le char Saint Chamond sans changement, avec le barillet introduit dans un pivot cylindrique blindé du support puis verrouillé en place. Plus de 7.000 balles de 8 mm ont été embarquées par les St. Chamond pour l'ensemble des mitrailleuses. Les boîtes de munitions en bois étaient rangées dans les grandes caisses que nous avons vues de chaque côté du caisson, dans de grandes boîtes à l'arrière, et dans de plus petites boîtes près des mitrailleuses.



Image 10 :
Le canonnier du 75 mm jette un coup d'oeil par le regard ouvert à gauche de son arme. Ce regard de canonnier était standard dans l'artillerie, monté à gauche du chariot du canon. Il fallait ouvrir un petit volet sur la facade de la plaque de blindage pour utiliser ce regard, ce qui offrait aux balles perdues une porte d'entrée dans le véhicule, en tuant de nombreux artilleurs.

Bien qu'il soit difficile de le distinguer sur cette photo, la main droite du canonnier est posée sur le volant d'élévation, le volant du latéral est monté en-dessous, et sur la même ligne que le volant d'élévation. Dans les premiers chars Saint Chamond, l'arme était le canon de 75 mm Saint Chamond, mais il fut rapidement remplacé par le canon de 75 mm standard modèle 1897, avec un fût plus long et de meilleures caratéristiques générales. Peut-être que, sur les 106 obus de 75 mm que pouvait embarquer le char, dix étaient rangés dans ce râtelier suspendu, et le reste dans les caisses de chaque côté du caisson à l'arrière.

Ce char en particulier possède le célèbre canon Modèle 1897 avec sa fameuse culasse rotative, qui plaçait cette artillerie française de précision en avance de dix ans ou plus sur les autres pièces de campagne contemporaines. L'arme tirait des obus de shrapnels de 7,2 kg à 539 m/s à plus de 6850 mètres. Un bon équipage pouvait tirer à une cadence de 30 obus/minute, et le canon était suffisamment précis pour ça. Évidemment, pendant que le char se déplaçait, le pauvre canonnier n'aurait pas pu toucher la facade d'une grange à 50 pas.

Le but premier du canon de 75 mm sur le St. Chamond était d'éliminer les canons de campagne de l'ennemi, les nids de mitrailleuses, et les concentrations d'infanterie, et ce travail il le fit très bien quand le véhicule n'était pas embourbé. Le latéral était limité à seulement 5 degrés à gauche et à droite, mais l'élévation pouvait aller jusqu'à +20 degrés, et positionnée en haut d'une pente, l'arme pouvait être utilisée comme un canon de campagne statique pour envoyer des obus à bonne distance.



Image 11 :
La culasse du canon français Modèle 1897 est une des raisons pour lesquelles il resta en service dans bien des pays jusqu'à la deuxième guerre mondiale et même après.

Connu officellement sous le nom de culasse type Nordenfelt, elle est plus communément appelée système de culasse à vis excentrique. Brièvement, le grand bloc en ovale de la culasse est une vis dont le diamètre est plus grand que la chambre du canon et une ouverture de chargement est située sur un côté de cette vis. Du fait que cette vis est décalée par rapport au centre du canon, le trou de chargement dans la vis de culasse ne s'aligne avec le canon qu'à seulement une position au cours de sa rotation (en haut). Une fois que la vis a tourné pour aligner le trou de chargement avec la chambre et qu'un obus a été chargé, la vis est tournée en sens inverse pour fermer la culasse. Le pas du filetage force la culasse contre la chambre, de même qu'il met le système de mise à feu en position correcte. La mise à feu se fait en tirant un coup sec sur la lanière attachée à l'anneau que vous voyez au bout du levier de mise à feu. Cette image montre l'ouverture de la vis de culasse, en bas, en position fermée et verrouillée.

Pour faire tourner la vis de culasse en position ouverte, la poignée en bas à droite est simplement poussée vers le haut de la culasse jusqu'à ce qu'elle s'arrête sur la butée que vous voyez tout à fait à gauche de l'anneau de culasse. Quand l'ouverture de la culasse tourne pour s'aligner avec la chambre, un extracteur expulse la douille usagée, et l'arme est alors vide et prête à recevoir l'obus suivant.

Ce canon de 75 mm en particulier repose sur un des premiers chariots, mais la culasse est pratiquement la même que sur tous les canons de 75 mm Modèle 1897. Un autre ajout intéressant au canon qui fait de lui une pièce si efficace en campagne est un mécanisme anti-recul hydro-pneumatique inédit. Il consistait en deux cylindres hydrauliques montés côte à côte sous le fût du canon et attachés à un piston flottant, un piston accouplé, une tête de gaz et un réservoir d'huile. Ce système anti-recul donnait une bien meilleure stabilité et une plus grande précision au tir. La combinaison de l'excellent système anti-recul avec la culasse à vis à chargement rapide donnait aux Français une véritable arme à "tir rapide", très estimée par l'artillerie de nombreux pays tout au long de la première moitié du 20° siècle et encore utilisée par certains jusque dans les années 1970.



Image 12 :
Cette photo de l'Imperial War Museum de Londres illustre une version ultérieure du St. Chamond, avec les kiosques circulaires du conducteur et du commandant supprimés et remplacés par de simples volets. Le toit également est incliné du centre vers les blindages latéraux. La suppression des kiosques était nécessaire pour réduire la hauteur du véhicule et éliminer le problème des brèches dans le toit quand ils étaient touchés par des tirs en opération.

Toutefois, en l'absence de tout kiosque pour voir sur le côté et en arrière, le conducteur avait un nouveau problème qui ne sera pas réglé avant la fin de la guerre, quand un nouveau kiosque lui sera ajouté en position avant gauche. Les volets de côté et d'avant du kiosque pourront être abaissés pour donner une vue panoramique.

Le premier engagement pour les équipages de St. Chamond et leurs boîtes blindées eut lieu le 5 mai 1917, au moulin de Laffaux. Lors de l'attaque, sur les 16 St. Chamond tous sauf un s'embourbèrent sur les premières lignes des tranchées allemandes, et ce fut une scène qui malheureusement se répéta continuellement. Bien que le St. Chamond fut retiré des opérations d'assaut, les soldats n'en avaient pas fini avec lui, car certains furent modifiés en transport de troupes sans le canon de 75 mm [et d'autres en "chars de ravitaillement"].

En tout, 400 machines ont été construites, le dernier Saint Chamond est sorti en mars 1918. Ce que les stratèges de chars français ont appris sur la conception des blindés avec le Saint Chamond pourrait remplir des volumes. Et, quand la construction cessa en 1918, ce fut pour rediriger les resources disponibles vers la production des FT 17 [Renault], un char plus petit, plus rapide et plus mobile qui était destiné à devenir l'une des meilleures conception de char de la première guerre mondiale.
 
 

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