PANHARD & LEVASSOR
1902
Note écrite de la main de Krebs
Archives Panhard
Note sur l'origine de la Société Anonyme des Anciens
Établissements Panhard et Levassor (Salon 1902)
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Origines
de la société
La Société Anonyme des Anciens Établissements Panhard
et Levassor recueillait en 1897 l'héritage d'une Maison dont les
états de service dans la mécanique étaient déjà
brillants.
C'est Périn, l'inventeur de la scie à ruban, qui créa,
vers 1846, la Maison qui devait être plus tard la Société
Panhard et Levassor. Son atelier était consacré à
la construction de la machine à bois et en particulier de la scie
dont il était l'inventeur.
La raison sociale de la Maison a été :
en 1846 Périn
1867 Périn Panhard
1872 Périn Panhard et Cie
1886 Panhard et Levassor
1897 Société Anonyme des Anciens
Établissements Panhard et Levassor.
Dès l'origine, la Maison n'a cessé de s'attacher à
obtenir la fabrication la plus irréprochable, condition indispensable
pour les machines à bois qui comportent généralement
des pièces animées de mouvements très rapides.
Construction
des premiers moteurs à gaz et des premiers moteurs à pétrole
Ces habitudes de précision dans le travail, ont amené cette
Maison à s'occuper de la construction des moteurs à gaz dès
les années 1875. Bientôt, après 1886, elle entreprenait
la construction des moteurs à essence dont elle avait acheté
les brevets à M. Daimler de Carnstadt.
Création
de la première voiture automobile
En 1891 la Maison Panhard réalisait la première voiture automobile
mue par moteur à pétrole, grâce à la persévérante
énergie de l'un de ses chefs, le regretté Émile Levassor.
Elle peut donc être considérée à juste titre
comme le berceau de l'industrie automobile.
Création
des différentes dispositions adoptées maintenant par tous
les constructeurs
Depuis que la première voiture automobile est sortie des ateliers
Panhard Levassor, chaque année a été marquée
par de nouveaux progrès, dont l'ensemble, adopté par tous
les constructeurs, constitue le type qui est universellement connu sous
le nom de type français après avoir été simplement
le type Panhard.
Ce type est caractérisé par les points suivants :
- Moteur à l'avant
- Roues en bois
- Volant de direction
- Levier de changement
de vitesse
- Position du radiateur
- Disposition générale de la transmission
du mouvement
- Chassis en bois
armé.
Chacune
des étapes franchies, chacun des progrès réalisés,
a reçu sa consécration dans les grandes épreuves
sportives auxquelles les voitures de la Société ont pris
part.
1895 Paris - Bordeaux - Paris (endurance)
1896 Paris - Marseille - Paris (endurance)
1897 Paris - Dieppe (1er emploi du radiateur)
1898 Paris - Amstrerdam (direction par volant irréversible,
équilibrage des moteurs à quatre cylindres)
1899 Paris - Bordeaux (radiateur à l'avant)
1899 Tour de France (frein à mâchoires sur
le différentiel)
1900 Paris - Toulouse (changement
de marche sans déplacement de pignons d'angle)
1901 Paris - Berlin (moteurs sans joints à la
culasse, suspension du mécanisme en trois points)
1902 Paris - Vienne (moteurs à cylindres en acier
extra léger, emploi
de l'acier au nickel, frein sur roues serrant avant et arrière).
Dans toutes ces épreuves la Société Panhard Levassor
s'est efforcée de conserver la supériorité par la
bonne conception et la bonne exécution de ses voitures et non par
l'emploi de moteurs d'une puissance exagérée.
Parmi les perfectionnements qui ont marqué chacune des étapes
ci-dessus et dont la plupart ont fait l'objet de brevets pris par la Société
Panhard Levassor (liste générale en annexe), nous appellerons
tout particulièrement l'attention sur les points suivants :
La
direction irréversible dont l'emploi est devenu tellement
général qu'il semble impossible de faire maintenant une voiture
automobile qui n'en soit pas munie, aussi bien en France qu'à l'étranger.
L'équilibrage
des moteurs à quatre cylindres et à deux cylindres.
La
suspension du mécanisme par trois points (brevet du 14 janvier
1901).
Le
frein à mâchoires sur le différentiel qui a
également constitué un progrès faisant époque
(brevet du 16 décembre 1898).
Les
moteurs à cylindres en acier (brevet du 23 octobre 1901).
Choix
des matériaux - méthodes d'essai
Pendant que ces dispositions nouvelles étaient créées,
des perfectionnements constants étaient apportés dans la
fabrication, dans le choix des matériaux, la bonne exécution
du travail et la conception de l'ensemble et des détails.
Les premières voitures avaient été établies
dans les conditions ordinaires en usage dans la mécanique ; la puissance
des moteurs n'étant pas alors considérable il n'y avait aucune
difficulté à réaliser la transmission du mouvement
dans ces conditions.
La puissance des moteurs devenant plus importante et les conditions de
légèreté devant être respectées, on a
dû avoir recours à des métaux plus résistants
que ceux qu'on emploie habituellement.
La Société Panhard et Levassor, après avoir étudié
avec le plus grand soin les résultats donnés par la trempe
des aciers ordinaires, adoptait la première les aciers au nickel
pour la fabrication des roues de vitesse et des vilebrequins (la première
commande d'acier au nickel, adressée à la Maison J. Holtzer,
remonte au 3 juin 1901).
Le choix de l'acier, et d'une manière plus générale,
des métaux convenant le mieux à toutes les parties de la
voiture, a été fait à la suite de nombreux essais
de résistance et en particulier d'essais au choc, exécutés
d'après les méthodes les plus nouvelles. La Société
Panhard et Levassor a été la première (dans l'industrie
automobile) à l'employer en essais pour se guider dans le choix
des métaux à employer et pour étudier le traitement
qui convenait à ces métaux. Nous croyons pouvoir affirmer
que personne avant elle n'avait fait usage de ces essais pour étudier
la fragilité des aciers durs.
Le service des essais de la Société comporte, en plus du
laboratoire d'essai mécanique, un laboratoire d'essais chimiques.
La Société Panhard et Levassor ne concevait l'application
d'un moteur de grande puissance à une voiture de course qu'à
la condition que ce moteur fut tout particulièrement léger,
aussi a-t-elle été conduite la première à employer
des cylindres en acier forgé avec enveloppe d'eau en laiton.
Elle a ainsi obtenu des moteurs de 60 chevaux nominaux (70 CV effectifs),
pesant seulement 4 kg par cheval effectif et des moteurs de 24 chevaux
nominaux (30 CV effectifs), pesant seulement 5 kg par cheval effectif.
Les moteurs de ce type qui ont eu un si brillant succès en 1902
entre Paris et Belfort étaient commandés à la Maison
Holtzer, en ce qui concerne les cylindres, dès le 31 octobre 1901.
La construction de ces cylindres fait l'objet d'un brevet déposé
le 23 octobre 1901.
Nombreux
types de voitures répondant aux besoins variés de la clientèle
En ce qui concerne les types de voitures, la Société Panhard
et Levassor n'a pas craint d'aborder un problème d'une extrême
difficulté : constituer, au moyen d'un nombre restreint de pièces
interchangeables, un nombre considérable de types satisfaisant à
toutes les demandes.
Ce résultat a été obtenu de la façon la plus
complète. L'acheteur qui se présente dans les bureaux de
la Société peut choisir entre des voitures de huit puissances
différentes, variant de 5 à 60 chevaux, et pour chacune des
puissances, entre 40 solutions parfaitement définies et répondant
à tous les types de carrosseries.
Nous croyons devoir insister sur ce point, qui constitue l'une des principales
forces de la Maison et qui n'a été obtenu qu'en apportant
dans les études et le travail beaucoup d'ordre et de méthode.
L'exécution des pièces n'a pas été moins bien
coordonnée que la conception des types de voiture, l'interchangeabilité
étant obtenue par l'emploi de machines perfectionnées munies
de montages étudiés et établis par la société
et assurant la bonne exécution indépendamment de l'habileté
de l'ouvrier.
Enfin cette importante fabrication (actuellement 120 voitures par mois)
est contrôlée par un service de vérification spécial
complètement indépendant de l'atelier et auquel chaque pièce
est soumise après chaque étape de formation subie.
Nouveautés
présentes au Salon de 1902
Les nouveautés présentées par la Société
Panhard et Levassor au Salon de 1902 sont décrites succintement
dans la note A et les dessins qui y sont joints.
Nous nous permettons cependant d'attirer l'attention du Jury sur les points
suivants :
Nous considérons que le
carburateur automatique constitue une amélioration extrêmement
importante et tout à fait nouvelle. Depuis que nous avons réalisé
cet appareil et appelé le public à constater la façon
dont il fonctionne, on nous a signalé de nombreux efforts déjà
faits en vue d'obtenir le même résultat. L'existence de ces
différents essais ne nous surprend nullement car nous avions nous-même
fait antérieurement des essais analogues qui n'avaient pas eu de
suite, les résultats n'étant pas plus concluants que ceux
obtenus par nos concurrents. La raison en est que la solution entrevue
ne pouvait être réalisée qu'à la suite d'une
étude absolument complète et rationnelle des phénomènes
très délicats qui se produisent dans le carburateur pendant
les changements d'allure du moteur. Cette étude fait l'objet de
la note B, présentée à l'Académie des Sciences
dans la séance du 22 novembre 1902.
Les expériences auquelles le public peut assister journellement
au grand Palais, depuis l'ouverture de l'Exposition, prouvent surabondamment
que le résultat est obtenu.
Importance
de la Société Panhard et Levassor
Les bonnes traditions de travail et de loyauté de la Société
Panhard et Levassor lui ont attiré les sympathies d'une nombreuse
clientèle ; aussi son chiffre d'affaires s'élève-t-il
annuellement à plus de quatorze millions de francs. Les affaires
qu'elle fait avec l'étranger peuvent être évaluées
à un tiers de son chiffre d'affaires.
La Maison a construit actuellement plus de cinq mille voitures et voit
revenir périodiquement dans ses ateliers de réparation les
plus anciennes voitures sorties de ses ateliers. Toutes ces voitures font
un service régulier et ont conservé une valeur marchande,
c'est là une réclame pour ainsi dire vivante qui la dispense
d'en faire d'autres.
Ainsi la Société vient-elle d'être obligée de
construire, à proximité de ses ateliers de construction,
des ateliers de réparation qui occupent une superficie de 7000 m².
Ateliers qui sont l'objet de la plus grande sollicitude car c'est là
que les dispositions nouvelles sont jugées en dernier ressort. C'est
là aussi qu'on trouve souvent l'inspiration de dispositions à
adopter pour l'avenir.
La Société construit aussi des moteurs fixes pour groupes
électrogènes aux usages divers et des bateaux actionnés
par ses moteurs. Elle a remporté dans cette branche d'industrie
de nombreux succès.
Enfin elle fait aussi l'application de ses moteurs au matériel léger
pour chemins de fer.
La Société continue d'ailleurs la fabrication des machines
à bois et des lames de scies.
Brevets
principaux pris par la Société Anonyme des Anciens Établissements
Panhard Levassor
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21 décembre 1897
Perfectionnement aux embrayages par l'introduction
sous les lèvres de cuir de ressorts faisant varier progressivement
l'effort d'entraînement.
16 décembre 1898
Moteur à pétrole avec réglage
sur l'admission par le moyen d'un boisseau ou d'une valve commandé
par le régulateur.
11 novembre 1899
Changement de vitesse et de marche supprimant
le déplacement des engrenanges coniques employés jusqu'alors
pour obtenir la marche avant ou arrière.
5 mai 1900
Pompe rotative de petite dimension à
grand débit avec dispositif pour récupérer une grande
partie de la force vive.
7 juillet 1900
Système de régulateur de
vitesse agissant sur l'admission par étranglement des gaz aspirés
et proportionnant la puissance des coups de piston à la résistance
de la voiture.
21 juillet 1900
Moteur à explosion dénommé
"Centaure" avec réglage sur l'admission. Tous les organes très
simplifiés de ce moteur sont enfermés dans un carter sauf
le régulateur.
14 décembre 1900
Système d'embrayage à cône
avec tores d'entraînement supprimant le glissement longitudinal sur
l'arbre commandé. Cette disposition réduit dans une très
large proportion l'effort nécessaire pour produire l'embrayage.
8 janvier 1901
Système d'équilibrage des
moteurs à deux cylindres. Le procédé consiste à
créer un couple d'inertie égal et contraire au couple produit
par l'ensemble des bielles et manivelles. La formule établie dans
la description du brevet donne la solution générale. Dans
le cas particulier, le couple antagoniste est créé en partie
par suppression de masse et donne la solution la plus légère.
14 janvier 1901
Suspension par trois points. Cette disposition
soustrait le mécanisme aux déformations élastiques
que subit toujours le châssis de la voiture pendant le roulement
; elle supprime deux articulations et diminue les frottements de 8 à
10%.
23 octobre 1901
Perfectionnements aux moteurs "Centaure"
pour obtenir des moteurs légers. Emploi des cylindres en acier avec
enveloppes d'eau rapportées, etc.
16 novembre 1901
Appareil de distribution du courant primaire
pour l'allumage électrique. Les contacts sont obtenus au moyen de
balais métalliques enfermés dans une boîte et complètement
à l'abri de la pluie, de la boue et de la poussière.
22 février 1902
Freins métalliques pour roues d'arrière
fonctionnant dans les deux sens de marche.
24 février 1902
Système de graissage par pompe
actionnée par les gaz d'échappement supprimant tout mécanisme
reliant la pompe au moteur.
26 mars 1902
Système d'essieu et de ressort
pour avant-train de véhicules automobiles.
25 juin 1902
Soupapes d'aspiration commandées
par cames extensibles permettant de régler à volonté
le volume aspiré par les cylindres et par suite de ne conserver
de compression que ce qu'il faut pour permettre l'allumage. La mise en
route d'un moteur puissant est ainsi rendue très facile.
Carburateur automatique (voir notes A et
B).
Radiateur à courant d'ai forcé
et réservoir réduit (note A).
Nouvel appareil de graissage (note A).
Appareil de contrôle de la vitesse
des moteurs (note A).
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